Considéré par Jack Goldstein comme le cousin d'un film, l'artiste a réalisé, entre 1976 et 1986, des disques en vinyle transparent, colorés et noirs. Chacun d'entre eux fait référence à un objet, une action ou un événement unique, allant de l'abattage d'arbres à un meurtre, en passant par une noyade ou le bruit du vent. Le son provient d'une bibliothèque d'effets sonores.

« Les couleurs sont apparues en premier, puis les images », explique Goldstein. « Ce ne sont pas les sons qui m'intéressent, mais les images. Je voulais faire un film sur le vent, par exemple, mais je n'arrivais pas à le réaliser. En tant qu'enregistrement (The Dying Wind), il fonctionne à merveille. Je peux tenir le vent dans la main... Il est présent physiquement. Je voulais faire un film sur un homme qui se noie, mais ce n'était pas possible, alors j'ai fait un vinyle à la place. Le disque vous offre la même expérience. C'est la direction que prend mon travail : faire ressentir une situation extrême, mais à distance, de manière à ce que vous puissiez la contrôler. Je ne crois pas qu'il soit nécessaire de vivre une expérience en temps réel et dans l'espace pour la connaître. On peut la vivre dans sa tête sans avoir à la vivre dans son corps ».

Nous présenterons la première et emblématique oeuvre sonore produite par l'artiste en 1976 intitulée A Suite of Nine 45 rpm 7-Inch Records with Sound Effects. Les titres évocateurs des neuf vinyles sont associés à leurs contenus sonores et le son est pressé sur des vinyles de couleurs différentes. Le choix des couleurs donne une information complémentaire quant à la nature du son. La suite se compose des éléments suivants : A German Shepard, sur vinyle rouge ; A Swim Against the Tide, sur vinyle bleu ; A Faster Run, sur vinyle orange ; The Tornado, sur vinyle violet ; Two Wrestling Cats, sur vinyle jaune ; Three Felled Trees, sur vinyle vert ; The Lost Ocean Liner, sur vinyle noir ; The Burning Forest, sur vinyle rouge et blanc ; The Dying Wind, sur vinyle transparent.

Les sons gravés sur les disques de Jack Goldstein sont des images qu'il voulait transformer en films. La présence physique et la couleur de chaque disque sont importantes. L'enregistrement sonore d'une tornade a été gravé sur un vinyle violet car l'artiste avait observé que le violet était la couleur des tornades lorsqu'elles étaient photographiées. Matt Mullican se souvient d'une visite que Jack et lui ont faite lors d'une exposition de Jannis Kounellis à la Sonnabend Gallery en 1974. Le cube blanc de la galerie avait été peint en jaune vif et un cheval noir vivant se tenait contre le mur. Jack a été frappé par l'objectivation du cheval par Kounellis, qui faisait écho à sa propre préoccupation de contrôler les animaux et les forces naturelles dans des images épurées et objectivées. Comme il l'a fait dans des films tels que Shane, de 1976, dans lequel un berger allemand, placé sur un fond noir sans relief, aboie de manière répétée et sur commande.